« Les complications de la lèpre sont plus durement ressenties chez les femmes. Mutilées ou amputées les femmes qui vivent avec cette pathologie rencontrent d’énormes difficultés à gérer leur foyer.» S’exprimait ainsi la dermatologue vénérologue, le professeur Pauline Dioussé Ngom, enseignante à l’UFR Santé de Thiès. C’était au cours d’une table ronde sur les enjeux de l’inclusion des femmes affectées par la lèpre. Cette rencontre initiée par l’Association Sénégalaise de lutte contre la lèpre et les maladies tropicales négligées était une occasion pour la spécialiste de sonner l’alerte sur cette pathologie qui appauvrit la femme et rend difficiles les conditions de la femme. «La lèpre affecte les deux sexes de manière comparable mais avec les femmes c’est assez difficile parce que traditionnellement, ce sont elles qui ont en charge les travaux domestiques et même champêtres dans certaines contrées et si elles n’arrivent pas à le faire à cause de leurs amputations, imaginez le désastre que cela va occasionner dans les foyers : pauvreté, insalubrité, mauvaise éducation des enfants et tous les autres maux sur le plan social qu’une personne qui n’a pas les moyens peut vivre. » Les personnes affectées souffrent durement de stigmatisation et de discrimination. Cette maladie sociale mérite d‘être connue pour que tout le monde puisse en parler afin que le diagnostic et la prise en charge se fassent précocement.
Quels rapports entre la dermatologie et la lèpre ?
La lèpre est une maladie bactérienne qui touche la peau et les nerfs. Les personnes affectées présentent des lésions cutanées qui sont visibles. « C’est un processus long mais aussi lent et qu’à la longue ça affecte leur psychologie. » Renseigne la dermatologue qui ajoute que quand les bactéries commencent à toucher la peau, des taches claires apparaissent chez le malade. Ces taches localisées quelques parts sur la peau, sont indolores. Le malade peut marcher pieds nus ou bien toucher quelque chose de chaud sans s’en rendre compte. « C’est comme cela que ça commence jusqu’à ce que l’atteinte soit justement visible avec les amputations, les chutes, les déformations et défiguration. » La période d’incubation est longue, elle est comprise entre 10 et 20. Dans ses explications, le médecin estime qu’après quelques années, les taches deviennent plus grandes et plus nombreuses. Après les taches, il y a des nodules et d’autres signes comme l’atteinte neurologique qui survient avec une atteinte des nerfs. Outre la peau, la lèpre touche toutes les parties du corps. « De la tête aux pieds. Au niveau des yeux il y a l’atteinte oculaire due à l’atteinte des nerfs au niveau des yeux. Avec cette complication, le malade ne peut pas fermer les yeux qui sont exposés au vent et à la poussière à la longue, ça détruit la cornée ce qui peut évoluer vers une cécité. ». Le Sénégal a certes mis en place du Programme National d’Elimination de la Lèpre (PNEL) avec la prise en charge gratuite des malades, mais le problème demeure. Il faut donc une forte communication autour de cette maladie handicapante. Le principal problème de l’avis du Pr. Ngom c’est le dépistage tardif des malades mais aussi, ajoute-t-elle « Il faut sécuriser les zones transfrontalières car il y a des malades qui nous viennent d’autres pays.»
Mbagnick DIOUF
